La montagne nous met à l’épreuve.
En vérité, il arrive souvent que la première visite laisse un mauvais souvenir. Tout se passe comme si la montagne donnait sa leçon aux visiteurs.
"Je ne reviendrai jamais !" est le mauvais choix. Il faut en connaître la raison.
La montagne nous met à l’épreuve.
Je connais une dame de 44 ans qui s'est rendue une fois par mois au sanctuaire pendant 18 ans. Elle fait sa première visite avec son ami qui la lui a proposée. Elle se rend à Inari l'esprit léger et en tenue décontractée, portant son béret, sa mini-jupe et ses bottes longues. Le style de la parfaite touriste. C’était un 4 janvier. La montagne grouillait de monde, comme à chaque fois lors des promenades au temple du nouvel an. Quand son ami la photographie devant le petit restaurant, elle sent qu'on l'observe et entend à peu près ces paroles :
- J’en étais sûre ! Si elle pense que c’est élégant comme ça.- Quel genre de couple ils font ? ah ah !
- Ces bottes, elles sont carrément trouées !
Levant les yeux, elle aperçoit une dizaine de filles qui, du premier étage du restaurant, se parlent sans aucune retenue. Elles portent un tablier. Ce sont sûrement des saisonnières. Comme leurs voix viennent d’un peu loin, et que la montagne des dieux les atténue, la dame pense qu’elle a mal compris. Mais tandis qu’elle entend encore les mauvaises langues, elle dévisage les jeunes filles à son tour : l’une d’elle prend alors un air dégoûté.
Mais, elles se moquent de nous, ma parole...
Elle en est si affectée qu’elle retourne chez elle. Par la suite, elle imagine ce qui s’est passé. Les jeunes filles pensaient-elles qu’elle était de leur génération ? Etaient-elles jalouses d’elle ? Mais sur le moment, elle n’avait pas trouvé d’explication. Profondément bouleversée, elle annonce à son ami qu’elle ne remettrait jamais plus les pieds dans cette montagne.
Le mois suivant, son ami l’invite à Inari, malgré la position qu’elle a prise. Elle refuse, mais son ami insiste : il souhaite aller avec elle à Inari au temple Ganriki-sha, précisément.
Il est vrai qu’ils n’y sont pas allés la fois précédente. Elle accepte finalement pour son ami.
Les voilà au sanctuaire. Après avoir prié, ils prennent une photo de souvenir devant un torii. Elle s’assoit sur la base du montant du portique. Puis pour les photos, elle le piétine légèrement plusieurs fois, comme si le torii était à elle.
Le lendemain, elle a soudainement mal au dos, tellement qu’elle doit se rendre à l’hôpital pour y passer des examens. Cependant, le médecin ne trouve rien sur la radiographie.
L’après-midi même pourtant, elle ne peut plus se mettre debout ni bouger le dos sans éprouver une intense douleur. Deux jours passent ainsi, quand son ami vient la voir. Il affirme que sa douleur a pu survenir durant le moment de la photo prise au torii. Elle se sent étrangement d’accord avec lui et jure que jamais on ne l’y reprendra ; en pensant à ce torii, elle se désole de son attitude passée.
Le lendemain, elle est parfaitement guérie.
Les mois suivant de mars et avril, elle renouvelle ses visites dont elle aura également mauvais souvenir. En effet, ce sont les comportements de visiteurs, de marchands ou de prêtres qui l’affectent cette fois encore. En même temps, elle prend conscience que tout ce qui la heurte contribue à la transformation de sa personne en être modeste.
Elle a 44 ans maintenant. Et elle est PDG d’une société. Elle se rend à Fushimi Inari chaque mois tandis que la montagne lui réserve une épreuve, comme à chaque fois.
J’ai entendu des histoires semblables transmises par d’autres personnes et j’ai moi-même aussi vécu ce genre d’expérience.
La montagne nous teste en nous rendant ainsi capables de découvrir ce que la vie recèle d’humanité.
KATO